un mot pour un autre :: les carnets de bord
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Pascale Lemée | Carnet du 7 juin posté le 8 juin Hier, à chaque pas dans les allées désertées du parc, à chaque regard sur les murs lisses, propres et froids des façades aux fenêtres fermées, à l’absence du corps des autres je me suis heurtée… J’ai marché encore, regarder toujours et puis imperceptiblement, sans l’avoir décidé, j’ai commencé à écouter… à écouter ce qui dans la lumière de l’après-midi, dans la pluie tombée sur la nuit, derrière les murs et les portes closes se donnait à entendre, le silence… le silence de leur voix, de leur regard, de leur corps endormi, déjà, peut-être… Dès mon premier pas, mon premier regard, je l’ai compris à cet instant précis, par eux, par chacun d’entre eux, j’ai été accueillie… le silence n’était pas absence, il était du temps suspendu entre nous, mais offert déjà, mais partagé déjà aussi, comme une pudeur dans l’attente de notre première rencontre… Dans le prolongement de la nuit inéluctablement demain viendrait, je savais ça, mais à les écouter encore au moment de m’endormir, j’étais devenue sans inquiétude, sans impatience aucune. Demain avait commencé depuis deux heures quand j’ai fermé les yeux et puis très vite l’heure du rendez-vous est venue, et plus vite encore près d’eux j’ai été… Soudain ils étaient là, oui, ils étaient tous là, et si le temps jusqu’à les rejoindre m’a semblé se précipiter, c’est calme et paisible que je les ai regardés… comme c’est calme et paisible qu’ils m’ont regardée… et j’ai reconnu les corps, les visages et les voix que dans le silence j’avais écouté… dans les regards, j’ai trouvé la trace intacte de leur pudeur et j’ai pensé comme on se ressemble, comme on se ressemble…
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[Texte pour l'atelier d’écriture de Filip Forgeau. Sujet : écrire sur l’objet personnel qu’une personne vous a confié.] La Châtaigneraie Ce que je vois ce n’est pas tant la bague donnée que la main qui vers moi se tend… Sur le blanc du papier, délicatement, elle a été posée, et tandis que les doigts nus se sont déjà envolés, dans l’argent cerclé danse, soudain, le bleu des yeux de Sarah…
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