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Pascale Lemée | Carnet du 12 juin posté le 13 juin
[Consigne d'écriture…]
Ce que j’ai à dire en noir…
Le changement de couleur ne m’est d’aucun secours.
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Ce dont on ne se sait pas très bien d’où ça vient, ni vers quoi, vers qui ça va… (suite)
La violence qui partout et à chaque instant, en chaque être se tient, se terre et se tait. Cette violence latente que l’on sent, pressent dans la chaleur de l’après-midi quand, assis à la terrasse à boire un café, tout paraît pourtant si calme, si paisible. La tension presque palpable qui vous accompagne tandis que vous marchez seul(e) dans les allées à chaque pas, pour chaque personne croisée, saluée ou ignorée. L’inquiétude qui s’empare de soi, incontrôlable, incontrôlée à chaque poignée de mains, chaque bonjour échangé. L’à peine perceptible sensation d’angoisse qui vous prend au ventre dans la proximité d’un corps soudain comme dans la soudaineté de son départ.
La violence, contre qui pourrait-elle soudain se diriger, pour quelles raisons ?
Pour un mot de trop ou un silence trop appuyé, un geste qu’on aurait fait ou qu’on n’aurait pas fait volontairement ou par distraction, pour une attente à laquelle on n’aurait pas su répondre parce qu’incomprise ou simplement pas ressentie, à cause d’un certain ton de voix, d’un certain regard, pour une cigarette refusée, un café offert, à cause de la couleur d’une chemise aussi bien, pour toutes ces raisons, qui ont leurs raisons aussi improbables, aussi injustifiées aux regards des uns, mais justifiées aux yeux de l’autre, et pour toutes celles qui m’échappent, un coup pourrait être donné, un cri être lancé, une crise être déclenchée… Je sens ça, à chaque moment et en tous lieux, en ce monde où l’ordre et la propreté, l’organisation réglementée dirigent tout, contrôlent tout, du cours de la vie des êtres jusqu’à la taille des haies, la hauteur des arbres, de l’herbe des pelouses, les horaires des prises de médicaments, les dates d’entrée et de sortie…
Du chaos collectif et individuel, on est au bord, en déséquilibre permanent, et s’il n’est pas le même pour tous, personne n’est épargné, personne ne peut y échapper. Restent, çà et là, pourtant, des moments de grâce pour des raisons qui demeurent elles aussi incompréhensibles et obscures mais qui sont peut-être les mêmes, comment le savoir, qui saurait le dire, que celles qui pourraient nous faire basculer dans les coups, les cris et les larmes…
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