|
Pascale Lemée | Carnet du 13 juin posté le 14 juin
[Consigne d'écriture…]
Ce que j’ai à dire en blanc…
Pitiéééééééééé !
* * * * * *
Choses vues, choses entendues… (suite)
Votre monde d’artistes, je le vois pleins de requins.
Le parking, dès le vendredi soir jusqu’au lundi matin, désert.
Qu’est-ce qu’il y a derrière cette porte fermée ? Moi, ce qui m’intéresse c’est toujours ce qu’il y a derrière les portes.
Les allées et les bancs désertés.
Un silence qui résonne de l’absence de chacun dans un décor devenu dans la chaleur, la lumière aveuglante de midi, fantomatique.
J’entends ça. Ce que tu dis là, je l’entends.
Dimanche, « jour de visite des familles », des femmes et des enfants, quelques voitures, comme des figurants, des accessoires oubliés d’un spectacle depuis longtemps terminé, ils apparaissent puis disparaissent dans l’attente peut-être de la prochaine représentation…
Des escaliers, puis un goulot d’étranglement jusqu’à la chapelle.
La maladie serait-elle partie, elle aussi, en week-end ? N’existerait-elle que les jours ouvrables ?
– Hier, t’étais là et t’es pas venue me voir.
– Je t’ai pas vu.. Je savais pas que t’étais là.
– Fallait toquer.
Pluie… entendue… écoutée.
– Je suis bien ici. Les gens sont gentils. Y’a pas d’histoires. Je me plais bien.
– …
– On a des permissions de sortie.
– Pour aller où ? (silence) Aller les emmerder ?
– T’as raison.
– Sortir c’est bien quand on a des affaires à récupérer, c’est tout.
– T’as raison.
Les meurtrières à l’horizontale où passer les plateaux recouverts d’assiettes et de verres à moitié pleins à moitié vides, vides, d’assiettes, de verres et de couverts sales, de papiers, de serviettes en papiers tâchées, froissées…
Je vais m’allonger un peu, et dormir peut-être, qui sait…
Le visage découpé de l’homme derrière les meurtrières… sa main qui des plateaux se saisit sans un mot, sans un regard.
Y’a trente ans les infirmiers c’étaient des anciens boxeurs, des anciens catcheurs, des types costauds, pour pouvoir maîtriser les malades.
Bibliothèques des patients : petite pièce rectangulaire, livres soigneusement rangés sur trois pans de murs du sol au plafond, une échelle, un poste de radio allumé, deux petites tables, sur l’une une caisse de livres, sur l’autre des revues.
En décembre presque personne ne vient chercher de livres, parce que c’est la période des fêtes, mais en juin ça va. Le femmes lisent des romans, les hommes des revues.
Accrochée à une étagère dans la bibliothèque des patients, une blouse blanche.
La bibliothèque médicale est interdite aux patients, faut comprendre, un malade qui serait schizophrène et qui lirait quelque chose sur sa maladie, ça serait traumatisant pour lui.
Un homme à la démarche incertaine, soutenu par une infirmière remontant vers la pavillon Berguounian. Précision du geste, douceur, réciprocité de la confiance.
Mes deux parents ont travaillé à Esquirol, j’y travaille, ma femme aussi, et ma fille est infirmière.
Petits pains : portion individuelle de pain.
Enfermés dans un sac de plastique blanc, qui à l’intérieur lentement mais sûrement ramollissent, qui à l’air en une heure deviennent durs comme la pierre… petits pains que personne ne fera jamais danser… Charlot reviens, ils sont devenus fous !
|
|