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Jean-François Patricola | Carnet du 11 juin posté le 12 juin

A Paris, bref aller et retour. Date prévue depuis plusieurs mois. Préparation et organisation du colloque Blanchot-Levinas en novembre 2006. Ainsi donc toutes ces années dédiées à Blanchot n’auront pas servi à rien. Mais comment se débarrasser de Blanchot ? Et d’ailleurs, peut-on réellement se débarrasser de lui ? Dans le train, j’épluche les intitulés des communications nationales et internationales pour le colloque : « Figures de la nuit : l’autre et le neutre », « questions de responsabilité ou la communauté impossible », « réponses d’outre-tombe », « entre mal et désastre », « l’obscurité et le dire », « être à l’écart : Lacoue-Labarthe lecteur de Blanchot et Levinas », « même la mort est impossible », « trahir le Dire, traduire le cri », « d’un seuil d’espacement », « aux confins de l’humain », « la parole comme détour », « la Responsabilité pour l’Autre et la Responsabilité de protéger », etc… Qu’en dire ? Qu’en penser ? Moi aussi j’ai questionné ces figures : celle du neutre, de l’altérité, de la Loi. Cela ne m’empêche pas d’être critique et en retrait aujourd’hui. Car toutes ces strates de savoir, cette théorie qui n’enfante que de l’écholalie, qui noircit de pleines pages pour une impossible communauté, qui se réfléchit elle-même sans même d’abord se penser, que deviendrait-elle face à la pratique ? Confronté à ses mots ? Il faudrait les inviter en ces lieux tous ces chercheurs et les présenter à toutes ces figures qu’ils désirent embrasser. S’asseoir sur un banc et questionner le seuil de l’espacement ou les confins de l’humain en dévisageant un homme, une femme, le regard perdu dans l’au-delà uniquement animé de tics faciaux. Leurs théories en seraient nécessairement ébranlées. Oui, je songe à tout cela. Le parc est plein de Thomas tous aussi obscurs les uns que les autres, d’arrêts de morts, de derniers hommes, de personnes qui ne nous accompagnent plus ou pas. L’existence est gorgée de ces figures littéraires et vice-versa. Mais la théorie littéraire est incapable à réunir les deux, à les associer. Quant à la praxis…

Dans le train, l’homme à mes côtés s’est endormi et ronfle comme un moloch dans son antre. Plusieurs fois, je lui ai administré un coup de coude bien senti tant les trilles me vrillaient les nerfs. Mais rien n’y fit. Dans ses mains, un magazine de voitures. Moi, je lis le dernier « So Foot ». Dossier qui colle à ma réalité du moment : « OL au-dessus d’un nid de coucou ! » ou encore « Football ou Schizophrénie » ! Mais où va-t-on si même dans les magazines consacrés au football on nous parle de Mélanie Klein et de Lacan plutôt que catenaccio et 3-5-2 ? Et que dire de l’interview de Jean-Louis Murat, le chanteur exécrable qui parle des joueurs cherchant leur père ou leur mère sur le terrain, qui sont complètement asexués, de leurs déficits de personnalité, etc ! Nulle part on est à l’abri ! Jung !

 

 

 

 


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